1. Anatomie d’un mail de phishing : mettez-vous dans la peau du destinataire
Prenons un exemple concret :
Objet : "Suspension immédiate de votre compte – Action requise"
L’email imite parfaitement celui d’un opérateur téléphonique. Le logo est identique, la signature professionnelle, et l’expéditeur semble sérieux : service-mo-jo@orange-securite.com. Pourtant, chaque élément cache une arnaque.
Ce que voit votre destinataire lors d'une tentative de phishing
- Un message alarmant : il est question de suspension ou de fraude, ce qui provoque un réflexe de panique.
- Un lien rassurant : “Cliquez ici pour valider votre identité”.
- Une adresse d’expéditeur proche de la vraie, mais avec une variation subtile.
- Un appel à l’action rapide, qui empêche toute réflexion à froid.
Ce que cache réellement ce mail de phishing
- Le lien renvoie vers un site frauduleux imitant la page de connexion d’un service connu.
- L’adresse mail, bien que visuellement correcte, n’a aucun lien avec l’organisation réelle.
- Le texte contient souvent un ton trop formel ou trop urgent, ce qui devrait mettre la puce à l’oreille.
La signature ne comprend parfois aucun contact vérifiable, ni numéro, ni lien vers des mentions légales.
En tant que pro, posez-vous ces questions :
- Vos propres mails contiennent-ils un ton ou un format pouvant être confondu avec du phishing ?
- Vos liens sont-ils explicites ou masqués derrière des boutons génériques ?
- Fournissez-vous une adresse de réponse claire et identifiable ?
- L’apparence de vos mails respecte-t-elle les standards de confiance et de transparence attendus ?
Ce type d’analyse est essentiel pour auditer vos pratiques de communication. Trop souvent, des marques bien intentionnées envoient des messages qui — sans le vouloir — ressemblent à s’y méprendre à une tentative d’hameçonnage.
Et dans ce cas, c’est la relation client qui trinque.
2. Les typologies de phishing à connaître absolument
Tous les mails frauduleux ne se ressemblent pas. Et si vos destinataires reçoivent un mail suspect, ils feront instinctivement un parallèle avec vos propres messages. Connaître les formes les plus courantes d’hameçonnage est donc essentiel — pour les repérer, mais aussi éviter de les reproduire dans vos communications.
Le phishing bancaire
C’est la version la plus connue. Un faux mail émanant d’une banque, d’un service de paiement ou d’un compte client prétend détecter une activité suspecte ou vous demander de “valider votre identité”.
L’objectif ? Récupérer vos identifiants bancaires ou vos données personnelles.
Le phishing de livraison
Très courant depuis l’explosion du e-commerce, ce type de mail usurpe des plateformes comme La Poste, Chronopost ou Mondial Relay.
Votre destinataire pense que son colis est bloqué... mais le lien redirige vers un site frauduleux.
Le phishing via services en ligne
Netflix, impôts, Caf, plateformes de streaming, boutiques en ligne… tout y passe. Le mail semble venir d’une plateforme de confiance et vous pousse à mettre à jour vos données.
Les destinataires ont désormais un réflexe : “Est-ce un vrai mail ou une arnaque ?”
Faites en sorte que la réponse soit évidente.
Le phishing multicanal : SMS, appels, messageries
Les escrocs ne se limitent plus au mail. Ils utilisent aussi :
- les SMS (smishing) avec des liens courts vers des pages frauduleuses ;
- des appels (vishing) pour faire pression verbalement ;
- ou même des messages via WhatsApp, Messenger ou d’autres messageries.
En entreprise, formez vos collaborateurs à ne jamais divulguer de code, mot de passe ou données personnelles par téléphone, même sous pression.

3. Comment vos destinataires réagissent-ils face à un mail suspect ?
En tant que professionnel, vous avez probablement une bonne intuition des risques liés au phishing. Mais vos destinataires, eux, n’ont pas toujours les bons réflexes. Et leurs réactions face à un mail frauduleux peuvent influencer la confiance qu’ils vous accordent, même involontairement.
Comment éviter que vos emails soient considérés comme spam ? Cela commence par une meilleure compréhension de leurs réactions.
Voici trois profils de réaction typiques :
1) Le client stressé : il clique sans réfléchir
Sous l’effet de la peur ou de l’urgence, il clique immédiatement. Il pense qu’il risque de perdre son compte, ses informations personnelles ou son argent.
2) Le client méfiant… mais pas suffisamment informé
Il trouve le mail suspect mais ne sait pas quoi faire. Il hésite, le met de côté, ou contacte votre service client pour demander si le message est légitime.
C’est un point de contact crucial pour rassurer, informer et renforcer la relation.
3) Le client agacé : il signale ou se désabonne
Trop de messages ambigus ? Il vous classe comme spam, vous signale comme suspect ou se désinscrit, pensant que vous n’êtes pas fiable.
Ce que cela change pour vous, professionnel :
- Un email mal formulé peut vous faire perdre la confiance du destinataire.
- Un mauvais design ou un ton trop agressif peut vous faire passer pour un spammeur ou, pire, un escroc.
- Une absence de lien vers un signalement officiel (ou un service support réactif) peut laisser vos destinataires sans solution face à une vraie tentative d’escroquerie.
Et surtout, anticipez la perception client. Car face au phishing, ce n’est pas celui qui envoie le mail qui fait peur… c’est celui qui est mal compris.
4. Bonnes pratiques pour des communications sans ambiguïté
L’un des plus grands risques pour une entreprise, ce n’est pas d’envoyer un mail frauduleux… mais d’en envoyer un qui ressemble à une tentative de phishing. Un message flou, un lien ambigu ou un ton trop alarmiste peut faire fuir – ou pire, habituer vos destinataires à des signaux que les cybercriminels utilisent.
Adoptez le réflexe “anti-phishing design”
Vos emails doivent rassurer dès le premier coup d’œil. Pour cela :
- Utilisez une adresse d’expédition claire et cohérente avec votre nom de domaine (évitez les sous-domaines ou adresses génériques type noreply@contact-marketing-xyz.io).
- Intégrez un logo bien visible, une charte graphique familière, et une signature complète (nom, fonction, numéro, lien vers votre site).
- Privilégiez les liens explicites : bannissez les “Cliquez ici” vagues, et affichez les URLs complètes ou les noms de service associés.
Soignez le ton et le contenu
Un email n’est pas un spot d’alerte rouge. Évitez :
- les formulations trop urgentes : “DERNIÈRE CHANCE”, “CLIQUEZ IMMÉDIATEMENT”…
- les sanctions fictives : “Votre compte sera suspendu si…”
- les formules impersonnelles ou robotisées.
À l’inverse, privilégiez un langage clair, humain et informatif. Vos destinataires doivent comprendre ce que vous attendez d’eux… sans stress ni confusion.
Vérifiez la délivrabilité et la légitimité technique
- Activez les protocoles de sécurité mail (SPF, DKIM, DMARC) pour éviter que vos messages n’atterrissent en spam — ou ne soient détournés.
- Testez vos campagnes avec des outils de prévisualisation pour détecter les signes qui pourraient les faire passer pour un mail frauduleux.
- Intégrez une mention “Vous recevez cet email car…” pour rappeler le contexte.
5. Vous avez cliqué… ou vos clients aussi : que faire ensuite ?
Même avec les meilleures précautions, le risque zéro n’existe pas. Un clic malheureux, un fichier téléchargé, une fausse page complétée… Et le mal est fait.
Mais ce n’est pas une fatalité. Si vous (ou vos abonnés) avez été piégés, il y a des réflexes simples et efficaces à adopter — à condition d’agir rapidement.
1) En interne : mettez en place un protocole clair
Sensibilisez vos équipes aux bons réflexes :
- Déconnecter immédiatement l’appareil si une action douteuse a été faite.
- Changer tous les mots de passe liés aux comptes potentiellement compromis, surtout si des informations sensibles ont été partagées.
- Prévenir le service IT ou la personne responsable de la cybersécurité.Faire un signalement si besoin (voir plus bas).
Mieux encore : intégrez ce process dans un guide d’action en cas de phishing, accessible à tous, et mettez-le à jour régulièrement.
2) En externe : accompagnez vos abonnés
Si un abonnés vous contacte après avoir cliqué sur un lien frauduleux de phishing croyant que vous en étiez l’auteur, vous devez :
- le rassurer (“Vous avez bien fait de nous contacter”),
- lui expliquer les démarches à suivre (changer ses mots de passe, signaler, etc.),
- lui fournir des ressources fiables. En cas d’escroquerie par phishing, il est essentiel de déposer une plainte rapidement, notamment si des données sensibles ont été compromises.
De nombreuses plateformes officielles permettent de signaler les escroqueries d'hameçonnage en ligne directement sur internet, pour limiter leur propagation.
Exemple de ressource utile pour signaler l'hameçonnage :
- Signal Spam
- Pharos – Internet-signalement.gouv.fr
- Cybermalveillance.gouv.fr
3) Bonus : préparez des scénarios de crise
Que se passe-t-il si un faux mail circule au nom de votre entreprise ?
Anticipez le phishing avec :
- Un message officiel à diffuser (site, réseaux, email),
- Un support client briefé pour gérer les retours,
- Une page dédiée de signalement si vous êtes fréquemment usurpés.
Protéger vos abonnés, c’est aussi protéger votre marque et votre réputation. En cas d’usurpation, informez rapidement vos destinataires et centralisez les informations utiles sur une page dédiée.